De l’art engagé au Québec :
éthique et esthétique de l’utile
Fruit d’un travail collectif engagé, cette publication a été portée par un partenaire (le Centre SAGAMIE) et un comité composé de membres de Skol. Ce comité avait comme mandat de préciser la forme et le contenu de la publication et de statuer sur le corpus d’auteurs et d’autrices à inviter.
Optant pour une représentation du territoire québécois, de la diversité culturelle et de la multiplicité des expertises de notre milieu, l’invitation lancée par Skol laissait une grande liberté aux auteurs et autrices. Nous les avons conviés à aborder le thème de l’art engagé en le reliant à leurs sujets de recherche, leurs projets ou leurs préoccupations, en considérant l’art engagé au sens large, c’est-à-dire en incluant l’art politique, la manœuvre, l’art relationnel et le « socially engaged art ».
De cette invitation résulte un ouvrage aux formes de discours variées, allant de la description de projet ou du récit de parcours en passant par le dialogue entre artistes et la critique d’œuvres. Les questions soulevées sont multiples : quelle est la fonction de l’art (Goulet Letarte, Vaughan) ? Qu’est-ce que le label d’« artiste de la diversité » implique pour l’artiste concerné (Roberston, Gongora) ? Est-ce que l’art engagé peut avoir des effets indésirables, voire contraires aux intentions de l’artiste (Bertrand) ? L’art peut-il faire acte de résistance face à la logique de rentabilité (Tembeck) ? La manœuvre est-elle une forme irrécupérable par l’industrie culturelle (Richard) ? L’objet matériel peut-il devenir un prétexte pour créer des liens (Flynn, Vaughan) ? Cet objet et ces liens se transforment-ils selon le contexte social et politique (Deneault, Flynn) ?
Les artistes présentés dans ces textes offrent une perspective nouvelle sur des territoires familiers et communs à tous, en y infusant un élément qui décale notre perception habituelle : des esprits invoqués au musée (Robertson), le partage du sensible à l’hôpital (Cotton), la mémoire dans un chantier de construction (Pocreau), l’imposture aux élections nationales (Loyd, Waldron), le contenu de nos poches dans un espace public (Flynn), etc. Travaillant à même ces lieux hautement codifiés, les artistes y ouvrent des brèches, des espaces à échelle humaine, discrets, fragiles, et pourtant très fertiles.
Ponctuant ce parcours à travers le paysage hasardeux de 2021, ces espaces n’offrent pas le confort des aires de repos, car ils soulèvent eux-mêmes des questions éthiques et politiques. Semblerait-il que les promenades en 2021 nous accordent peu de répit, et si elles offrent un certain plaisir, c’est celui de se tenir tête haute dans les grands vents, de se confronter au tumulte pour entrevoir ensemble des pistes de transformation.